Narcisse ne veut connaître que lui-même ; il ne rencontre qu´une apparence. Il voudrait se voir comme un autre le voit,mais la fontaine ne lui présente qu´une image sans vie à laquelle il s´aliène. Il préférera cette image à lui-même ; l´amour qu´il lui porte l´en rendra captif, dans l´instant de sa contemplation. La véritable introspection demande d´être, au contraire, attentif à son activité même, à la mise en oeuvre des projets et à la réalisation de soi. Cette démarche s´effectue dans un univers qui est commun à tous ; dans cet univers nous rencontrerons donc d´autres personnes. Narcisse nous apprend, a contrario, qu´il ne suffit pas d´avoir un coeur pur ; la vie de l´esprit exige une action et d´abord sur soi-même. La destinée de chacun est bien à réaliser à travers des événements réels où l´imprévu a un rôle à jouer. Il ne suffit pas de se sentir exister ; il faut encore, même à travers ses propres tourments, s´engager dans l´action où là seulement on trouvera ce que l´on est. Le corps n´est pas à contempler,mais à nourrir de significations pour en faire l´instrument des conduites qui seules nous révéleront à nous-même. Ainsi lemonde de l´esprit n´est pas le secret de chacun, mais le lieu d´un frémissement à partir duquel sont interrogés les chemins de la vie et les regards des personnes. La pureté de la conscience ne consiste pas à s´isoler de tout,mais à exprimer dans le monde l´unité de sa vie personnelle. Celle-ci est alors devenue la lumière qui éclaire toutes choses en ce monde.
Louis Lavelle (1883-1951) a occupé la chaire de philosophie du Collège de France de 1941 à sa mort. Considéré comme l’un des plus grands métaphysiciens français, il est l’auteur, notamment, de La Parole et l’Écriture, Introduction à l’ontologie et Le Moi et son destin, parus aux Éditions du Félin.
Préface de Jean-Louis Vieillard-Baron
Narcisse ne veut connaître que lui-même ; il ne rencontre qu´une apparence. Il voudrait se voir comme un autre le voit,mais la fontaine ne lui présente qu´une image sans vie à laquelle il s´aliène. Il préférera cette image à lui-même ; l´amour qu´il lui porte l´en rendra captif, dans l´instant de sa contemplation. La véritable introspection demande d´être, au contraire, attentif à son activité même, à la mise en oeuvre des projets et à la réalisation de soi. Cette démarche s´effectue dans un univers qui est commun à tous ; dans cet univers nous rencontrerons donc d´autres personnes. Narcisse nous apprend, a contrario, qu´il ne suffit pas d´avoir un coeur pur ; la vie de l´esprit exige une action et d´abord sur soi-même. La destinée de chacun est bien à réaliser à travers des événements réels où l´imprévu a un rôle à jouer. Il ne suffit pas de se sentir exister ; il faut encore, même à travers ses propres tourments, s´engager dans l´action où là seulement on trouvera ce que l´on est. Le corps n´est pas à contempler,mais à nourrir de significations pour en faire l´instrument des conduites qui seules nous révéleront à nous-même. Ainsi lemonde de l´esprit n´est pas le secret de chacun, mais le lieu d´un frémissement à partir duquel sont interrogés les chemins de la vie et les regards des personnes. La pureté de la conscience ne consiste pas à s´isoler de tout,mais à exprimer dans le monde l´unité de sa vie personnelle. Celle-ci est alors devenue la lumière qui éclaire toutes choses en ce monde.
Louis Lavelle (1883-1951) a occupé la chaire de philosophie du Collège de France de 1941 à sa mort. Considéré comme l’un des plus grands métaphysiciens français, il est l’auteur, notamment, de La Parole et l’Écriture, Introduction à l’ontologie et Le Moi et son destin, parus aux Éditions du Félin.
Préface de Jean-Louis Vieillard-Baron