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BLUMENBERG Hans Lisibilité du monde (La) Librairie Eklectic

Lisibilité du monde (La)

Auteur : BLUMENBERG Hans
Editeur : CERF         collection : Passages
Nombre de pages : 428
Date de parution : 01/11/2007
Forme : Livre ISBN : 9782204083522
CERF820

NEUF Normalement disponible sur commande
Prix : 48.00€

"C´est par son scepticisme si particulier consistant à se méfier avec raison des déviations de la raison que Hans Blumenberg (1920-1996) est entré en émigration intérieure. Une émigration qui, après 1945, a refusé une certaine Allemagne ; celle de Heidegger et de Gadamer, de Hölderlin lu par eux, l´Allemagne de Jünger le « grand écrivain » et de Carl Schmitt le « grand juriste ». Or l´émigration intérieure est un acte de résistance, et celui qui prend cette voie est assuré d´écrire du fond des ténèbres – « de profundis ! » C´est aussi ce qui donne à l´œuvre de Blumenberg sa profondeur unique, on le verra dans ce livre-ci comme dans tous les autres qui seront un jour traduits. Ainsi sa solitude aussi est-elle relative : « Elle seule, la philosophie, écrit Blumenberg, permet de comprendre ce quelque chose qui, sans elle, nous ferait face comme étant de part en part inconnu et... ""unheimlich"". » ""Que voulions-nous savoir ?"" pourrait être la question traitée dans ce livre-ci, la question qui s´est glissée, depuis les deux siècles qui nous séparent de la « Critique de la raison pure » de Kant, à la place de sa question fondamentale : ""Que pouvons-nous savoir ?""

Il est permis de supposer que les déceptions dans la quête du savoir valent aussi d´être étudiées, parce que leur indétermination qui ronge représente un moment de tonalités historiques fondamentales sur une échelle qui va de la résignation jusqu´à la colère contre le monde. Qu´était-ce donc que le savoir semblait proposer, quelles promesses représentait-il ? Comment le monde devait-il, aurait-il dû se présenter, si l´incertitude à son égard ne devait plus engendrer le malaise ? Ce sont là des questions qui ressemblent à des choses que nous aurions presque oubliées. Elles ont été profondément enfouies comme ce qui ne saurait plus avoir d´importance. La « métaphorologie » est un procédé pour débusquer les traces de tels désirs, de telles exigences, qu´il est inutile de qualifier de refoulées pour les trouver intéressantes.

Même des attentes qui n´ont pas été comblées et qui ne le seront sans doute jamais sont des faits et des facteurs historiques, des incitations pour des séductions qui se reconstruisent constamment, jusqu´au délirant ""vogliamo tutto !"" Le désir souterrain, qui n´a pas été comblé, d´une expérience du monde plus intense, se donne alors des maîtres exotiques.

Le thème de la « Lisibilité du monde » ne permet de traiter que des épisodes. Mais que quelque chose reste un épisode ne suffit pas encore à lui donner tort. L´obstination avec laquelle certaines choses reviennent et s´inventent leurs métamorphoses donne davantage à penser que la stabilité avec laquelle d´autres choses se contentent de simplement rester là. Mais ce qui est en jeu aussi, ce sont les risques de folie préparés par ce qui revient et tient à disposition son énergie désirante pour le moment historique opportun : alors apparaît comme futur tangible ce qui ne peut pourtant être que le correctif d´un présent.

Pourtant un désir ne devient pas encore insensé du seul fait que l´on ne saurait le prendre pour la promesse d´un accomplissement possible. Voilà pourquoi le complexe métaphorique de la « Lisibilité du monde » est aussi un fil d´Ariane de la lucidité."


"C´est par son scepticisme si particulier consistant à se méfier avec raison des déviations de la raison que Hans Blumenberg (1920-1996) est entré en émigration intérieure. Une émigration qui, après 1945, a refusé une certaine Allemagne ; celle de Heidegger et de Gadamer, de Hölderlin lu par eux, l´Allemagne de Jünger le « grand écrivain » et de Carl Schmitt le « grand juriste ». Or l´émigration intérieure est un acte de résistance, et celui qui prend cette voie est assuré d´écrire du fond des ténèbres – « de profundis ! » C´est aussi ce qui donne à l´œuvre de Blumenberg sa profondeur unique, on le verra dans ce livre-ci comme dans tous les autres qui seront un jour traduits. Ainsi sa solitude aussi est-elle relative : « Elle seule, la philosophie, écrit Blumenberg, permet de comprendre ce quelque chose qui, sans elle, nous ferait face comme étant de part en part inconnu et... ""unheimlich"". » ""Que voulions-nous savoir ?"" pourrait être la question traitée dans ce livre-ci, la question qui s´est glissée, depuis les deux siècles qui nous séparent de la « Critique de la raison pure » de Kant, à la place de sa question fondamentale : ""Que pouvons-nous savoir ?""

Il est permis de supposer que les déceptions dans la quête du savoir valent aussi d´être étudiées, parce que leur indétermination qui ronge représente un moment de tonalités historiques fondamentales sur une échelle qui va de la résignation jusqu´à la colère contre le monde. Qu´était-ce donc que le savoir semblait proposer, quelles promesses représentait-il ? Comment le monde devait-il, aurait-il dû se présenter, si l´incertitude à son égard ne devait plus engendrer le malaise ? Ce sont là des questions qui ressemblent à des choses que nous aurions presque oubliées. Elles ont été profondément enfouies comme ce qui ne saurait plus avoir d´importance. La « métaphorologie » est un procédé pour débusquer les traces de tels désirs, de telles exigences, qu´il est inutile de qualifier de refoulées pour les trouver intéressantes.

Même des attentes qui n´ont pas été comblées et qui ne le seront sans doute jamais sont des faits et des facteurs historiques, des incitations pour des séductions qui se reconstruisent constamment, jusqu´au délirant ""vogliamo tutto !"" Le désir souterrain, qui n´a pas été comblé, d´une expérience du monde plus intense, se donne alors des maîtres exotiques.

Le thème de la « Lisibilité du monde » ne permet de traiter que des épisodes. Mais que quelque chose reste un épisode ne suffit pas encore à lui donner tort. L´obstination avec laquelle certaines choses reviennent et s´inventent leurs métamorphoses donne davantage à penser que la stabilité avec laquelle d´autres choses se contentent de simplement rester là. Mais ce qui est en jeu aussi, ce sont les risques de folie préparés par ce qui revient et tient à disposition son énergie désirante pour le moment historique opportun : alors apparaît comme futur tangible ce qui ne peut pourtant être que le correctif d´un présent.

Pourtant un désir ne devient pas encore insensé du seul fait que l´on ne saurait le prendre pour la promesse d´un accomplissement possible. Voilà pourquoi le complexe métaphorique de la « Lisibilité du monde » est aussi un fil d´Ariane de la lucidité."